Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 juillet 2007 2 03 /07 /juillet /2007 15:43

Le pouvoir et le cul France

 

C’est parfois intéressant de faire son noviciat scolaire au cœur de la France profonde, dans la capitale de la Gaule, à Lyon. Aux milieux des reliques gallo-romaines, entre le Rhône et la Saône, les deux fleuves qui façonnent l’esprit français, fait, d’une part, du catholicisme tempéré, à l’image de la Vierge de la Fourvière, qui projette éternellement son ombre du Magnificat sur la place Bellecour ; d’autre part, nourrit de l’esprit de résistance républicaine, opposée à toute forme d’intolérance et d’oppression. Tout comme l’activisme civique du quartier historique de la Croix Rousse. Les jeunes de cette banlieue lyonnaise, nichée sur les hauteurs de la capitale de la Gaule, ont donné des fils à retordre à la Gestapo allemande pendant l’Occupation. Plus récemment, c’est sont les jeunes de ce quartier pas comme les autres,  qui ont fait fuir le candidat Nicolas Sarkozy, pendant la campagne présidentielle. A Lyon, il y a de noms qui font l’histoire de France : Edouard Herriot, Jean Moulin, Raymond Barre, Francis Colomb, Anne Marie Comparini pour ne citer que ceux-là. Lorsque le débat est placé à ce niveau, il serait un sacrilège, disons indécent, de parler ici de cul ou de salope. Or, nous sommes en France, un Etat centralisé, où le bonapartisme fait bonne figure, tout le pouvoir se trouve concentré dans sa capitale, Paris. L’une des villes les plus frivoles au monde, qui a sa propre culture, ses évasions, ses rêves, ses vices et ses quartiers, dont Pigalle et Bois de Boulogne. A Paris, le pouvoir du cul s’affirme et s’exprime. Quand on parle d’un homme de pouvoir dans la capitale le cul va avec. Le bas du ventre est tellement présent et fort dans la vie des hommes puissants de Paris, à tel point que les journalistes, dont certains sont souvent au service de ces hommes, y compris au lit(1), ont décrété une autocensure, ad vitam, sur toute info au-dessous de la ceinture. Pour connaître les noms de grands cocus de l’Hexagone, il faut lire la presse de Genève, de Madrid, de Rome, d’Abidjan ou encore aller s’enquérir auprès du citoyen Makaya, du côté de Libreville. En France, par contre, c’est sous le manteau qu’il faut aller chercher la chose. C’est dans cette vision de l’autruche et de l’autocensure, qu’il convient de traiter, à la française, l’insulte du très «Parisien» Patrick Dévedjian à  la dame de Lyon. Anne Marie Comparini. Une femme authentique, loyale et fidèle à ses racines. C’est une Lyonnaise de bonne éducation, dont les mots fidélité et loyauté ont un sens. Elle suit, en cela, la longue tradition radicale de la région, sous forme de centrisme républicain et de l’humanisme chrétien rhônalpin. Salope, selon le petit Larousse illustré, dans son édition de 1981 (année d’élection de François Mitterrand, séducteur et courtois) veut dire femme dévergondée, de mauvaise vie, garce. Bref, c’est un mot ignoble, un terme d’injure et vulgaire dont l’étendu sémantique renvoie au sexe. Avec des hommes de pouvoir, à  l’oralité agressive et sexiste, dont le niveau de responsabilité est cruellement en décalage avec leurs manières, on est en droit de se poser des questions sur leur pédagogie. Peut-être une petite dose d’éducation sentimentale, sans Flaubert, mais avec pudeur et retenue, pourrait parfaire leur maturation. C’est ainsi que l’on pourrait faire la part de choses en France, entre le cul et le pouvoir. Néanmoins, force est de constater, qu’après le mot  racaille, vociféré aux jeunes de la banlieue par l’homme fort de l’UMP, le mot salope, lancé à la femme de la France profonde par le pro-consul de la même formation, on est entré à l’ère de l’américanisme triomphant, pathétique et phallocrate, où la France subie de plein fouet toute la misère des mots immondes.

 

(1)     Dans les années 80, on conseillait aux étudiants en journalisme,  de ne pas parler d’un ancien et redoutable ministre giscardien devant l’une des sommités de la presse hexagonale. Aujourd’hui, cette sommité poursuit sa flamboyante carrière, en illustrant les pages glorieuses du nouveau pouvoir.

 

Mbomio Ondo Bacheng

Partager cet article
Repost0

commentaires

E
Merci beaucoup pour cet impressionnant article
Répondre
M
Merci surtout à vous de me lire. Votre pays, je suppose, la France, m'a beaucoup donné, surtout sur le plan culturel. Amitiés